Collignon
L'épicier
Voisin de palier de chez Raymond Dufayel , Collignon est le Ceaucescu de l'épicerie
du coin. A la différence du dictateur susnommé, ce sont ses
parents qui lui ont légué le fonds de commerce. A sa naissance,
ils ont cru qu'il serait intelligent parce qu'il avait un grand front, mais
dès la troisième semaine, ils ont rabattu leurs attentes sur
la gentillesse de ses grands yeux noisette. Dès son premier mois, ils
étaient résolus à l'aimer comme il était, c'est-à-dire
bête et méchant. À quinze ans, sa mère devait encore
lui mettre le dentifrice sur sa brosse à dents. Elle aurait du continuer
jusqu'à cinquante, ça lui aurait peut-être évité
de confondre avec la crème pieds secs. Collignon passe son temps à
houspiller et à humilier Lucien, son commis, sans due personne n'ose
lui river son clou. Comme tous les imbéciles satisfaits d'eux, il a
des opinions bien tranchées sur tout et il n'a pas son pareil pour
colporter des histoires de filles kidnappées dans des cabines d'essayages
qu'on retrouve à Tombouctou, d'enfants enlevés à Disneyland
réapparus avec un rein en moins, d'os de rats extraits de la dentition
d'amateurs (le restaurant chinois, etc). Truismes à la noix, vannes
merdiques, calembours à deux balles Collignon régurgite tout
après s'en étre gargarisé avec délectation. Mais
sa méchanceté n'ayant d'égale que son ignorance crasse,
il cumule les " vieux comme mes robes ", les " fier comme bar
tabac ", ou autre " oiseau tombé du Nil ". Bref culturellement
parlant, Collignon, c'est " l'abbé Résina "...
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